Les membres de l’ACI – et leurs clients – peuvent-ils enregistrer les acheteurs potentiels à leur insu?

Souriez! Vous êtes enregistrés… à votre insu.

Ah, les lois sur la protection des renseignements personnels! Que du bonheur! Elles sont encore plus tortueuses que les romans d’Agatha Christie; un vrai cadeau… pour les avocats spécialistes. Pour le commun des mortels, par contre…

C’est peut-être parce que le temps se réchauffe (laissez-moi rêver), mais en ce moment, on me demande souvent si les membres de l’ACI et leurs clients peuvent enregistrer les acheteurs potentiels en secret lors des visites. Pourquoi feraient-ils ça? Pour protéger la propriété.

On peut considérer cette question de deux points de vue : juridique ou philosophique.

Quoi? Un billet de blogue philosophico-juridique? Dites-m’en plus!

Selon la loi, l’enregistrement des acheteurs potentiels lors d’une visite, à leur insu et sans leur consentement, équivaut à la collecte non autorisée de renseignements personnels. Le propriétaire-vendeur ou le courtier ou l’agent inscripteur (ou les deux) s’exposent à des poursuites pour atteinte à la vie privée en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE) ou d’une loi provinciale sur la protection de la vie privée.

De plus, si on enregistre une communication privée (p. ex., entre un acheteur potentiel et son courtier ou son agent), on risque d’être accusé d’un acte criminel en vertu de l’article 184 du Code criminel (Interception).

Si le propriétaire-vendeur ou le courtier ou agent inscripteur désire enregistrer l’acheteur potentiel (peu importe qu’il s’agisse d’un enregistrement sonore ou vidéo), il doit obtenir le consentement de celui-ci. La solution la plus efficace est d’obtenir son consentement écrit (p. ex., par courriel). Une autre solution plus risquée serait d’afficher un avis bien en vue sur la propriété pour que les acheteurs potentiels sachent à quoi s’en tenir. Les acheteurs qui choisissent d’entrer après avoir lu l’avis consentent implicitement à l’enregistrement.

Vous avez encore des doutes? Essayons d’éclaircir les choses avec une expérience en imagination.

Pour savoir s’il est approprié ou non de recueillir les renseignements personnels d’autrui, j’essaie de faire abstraction de mes motivations et de me mettre à la place de la personne que j’enregistre (dans ce cas-ci).

Est-ce que je trouverais ça acceptable? Même si on enregistrait une conversation avec mon partenaire ou mon agent? Et si mes paroles étaient retournées contre moi pendant les négociations?

Mmmmh… Vous voyez maintenant comment une pratique apparemment innocente (p. ex., un propriétaire-vendeur qui essaie de protéger sa propriété) peut sembler vraiment inappropriée d’un autre point de vue.

Voilà qui nous ramène à la réponse juridique. La conversation risque d’être gênante, mais croyez-moi, ça en vaut la peine.

L’article ci-dessus est publié à titre dinformation; il ne constitue nullement des conseils juridiques et ne cherche pas à se substituer à un conseiller juridique.

Simon Parham est avocat général et secrétaire général de L’Association canadienne de l’immobilier (ACI). Il possède une expertise dans diverses lois et questions fédérales, notamment la lutte contre le blanchiment d’argent et le droit relatif à la protection de la vie privée. Avant de se joindre l’ACI, il a travaillé en tant qu’avocat-conseil pour le ministère de la Justice, où il a fourni des conseils juridiques au ministère de la Défense nationale.


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